Simone Rocha Automne Hiver 2025-2026 «Un conte de fées sombre de tortues, de lièvres et de nostalgie obsédante« . Histoire par RUNWAY MAGAZINE. Avec l'aimable autorisation de Simone Rocha.
Simone Rocha a pris un virage vers des eaux plus sombres. Pour l'automne/hiver 2025-2026, la créatrice, longtemps associée à la féminité éthérée, à la dentelle et aux fioritures romantiques, a plongé dans le noir. Pas seulement quelques touches de deuil ici et là, mais une vague écrasante d'ensembles d'un noir d'encre, entrecoupés seulement par des lapins empaillés étranges en guise d'étoles en fausse fourrure et des textures fragmentées et en lambeaux. Cette saison, Rocha s'est inspirée de Le lièvre et la tortue, portant la fable de l'enfance à des hauteurs littérales troublantes : des lièvres en fausse fourrure drapés sur les épaules comme des étoles centenaires et des pochettes en résine en forme de tortue glissées dans les mains des mannequins.
Au cœur de tout cela se trouve un souvenir d’enfance. Rocha se souvient d’une conversation avec le directeur de son école, qui avait décrit la vie comme une course entre deux créatures : le lièvre téméraire et la tortue méthodique. Rocha a choisi la seconde option, et 15 ans après l’existence de sa marque, sa lente et constante ascension vers la célébrité dans le monde de la mode prouve la sagesse de cette décision. Mais ici, au lieu d’une simple leçon de morale, Rocha raconte une histoire de fantômes, d’archétypes et d’une beauté troublante qui persiste dans le subconscient comme un rêve à moitié oublié.
Un retour vers le passé
Les silhouettes de la collection remontent au début du XXe siècle, époque où les manteaux étaient spectaculaires, les détails décadents et les superpositions suggéraient à la fois excès et protection. Les vestes en cuir et les vêtements d'extérieur de style steampunk évoquent la rébellion victorienne, tandis que les manteaux en fausse fourrure découpés évoquent un mélange entre luxe vieilli et destruction contrôlée.
Bel Powley et Alexa Chung portaient des vestes de style perfecto, jouant l'esthétique de la « fille cool » avec une pointe de menace. Pendant ce temps, Fiona Shaw, qui portait l'avant-dernier look du défilé, incarnait une directrice d'école, enveloppée dans une robe en satin duchesse cintrée aux épaules et aux genoux par des chaînes antivol pour vélo. Ce détail, a noté Rocha, était un clin d'œil aux hangars à vélos de l'école, un lieu tristement célèbre pour la rébellion adolescente, les baisers volés et les secrets chuchotés.
Mais ce sont les lièvres qui hantent la collection. Les étoles en fausse fourrure de Rocha, imitant les fourrures vintage, n'étaient pas de simples accessoires ; elles étaient des symboles d'une époque révolue, une étrange relique du début des années 1900 ressuscitée comme une métaphore. Pendant ce temps, les vestes et les jupes en tweed bouclé à fils de guirlandes étaient lacérées et déchiquetées, suggérant à la fois la décadence et la réinvention. Il y avait quelque chose d'un peu troublant dans la façon dont Rocha abordait la nostalgie cette saison - ce n'était pas rêveur ou doux, mais fragmenté, presque spectral.




La tortue avance
Le dialogue permanent de Rocha avec la retenue, la superposition et la destruction délicate a atteint un nouveau crescendo avec des pièces reliées entre elles par des rubans, des détails de lingerie et des volants en cascade. L'un des looks les plus remarquables comprenait des bandes de jacquard de soie rose, lâchement attachées par un ruban rose, drapées sur des bloomers en fausse fourrure. Le jeu caractéristique de Rocha avec les silhouettes historiques, que ce soit par le biais de corsets, de coupes structurées ou de proportions exagérées, n'était pas absent, mais il était imprégné d'un nouveau type de tension.
Les vêtements pour hommes étaient tout aussi évocateurs, avec des hauts de rugby à volants, des costumes ornés de perles et une parka en queue de poisson ceinturée, le tout contrebalancé par une pochette en résine écaille de tortue. L'approche de Rocha envers la masculinité, tout comme son approche de la féminité, reste ancrée dans la dualité : fragile mais forte, romantique mais tranchante.
Une beauté envoûtante
La fin du défilé n'avait pas seulement pour but de clôturer une collection, mais aussi de cimenter une atmosphère. Shaw, incarnant la vision de Rocha, l'a décrite comme « je suis mort et je suis allé au paradis ».
C'est peut-être ce que Rocha avait prévu. Une vision du paradis, mais pas celle d'un ciel doux et nuageux. Au contraire, elle a affaire à un paysage onirique noirci, où de vieux contes chuchotent, où des lièvres se drapent sur les épaules comme des fantômes du passé, et où la tortue, lente et régulière, avance toujours.
Voir tous les looks Simone Rocha Automne Hiver 2025-2026























































